DÉPUTÉ BAMBA NDIAYE, FUSILLE KARIM WADE : «Je me demande pourquoi il est encore dans le gouvernement, dans l'espace public, en train de publier des lettres ouvertes, de polémiquer avec Robert Bo

Publié le par ESPACERDA

 

DÉPUTÉ BAMBA NDIAYE, FUSILLE KARIM WADE : «Je me demande pourquoi il est encore dans le gouvernement, dans l'espace public, en train de publier des lettres ouvertes, de polémiquer avec Robert Bourgi ? »

 

 

Les événements historiques du 23 juin dernier n'ont pas laissé indifférent le député Bamba Ndiaye, Secrétaire général du Mouvement populaire socialiste/Sellal, un parti membre de la mouvance présidentielle. L'ancien responsable du Mouvement pour le socialisme et l'unité (Msu) qui s'en réjouit, estimant que «c'est une bonne chose» pour la démocratie sénégalaise, fusille littéralement Karim Wade, se demandant pourquoi ce dernier est «encore dans le gouvernement». Bamba Ndiaye, qui aborde d'autres questions d'actualité, se lâche tout simplement. Entretien.

 

Quelle lecture faites-vous des événements qui se sont produits le 23 juin dernier ? 
Ce n'est pas surprenant. Je pense que ces événements traduisent un déficit de concertation à plusieurs niveaux, pour ne pas dire à tous les niveaux. Déficit de concertation au sein de la majorité, de la classe politique et au niveau du Sénégal dans son ensemble. Au fond qu'est-ce qui s'est passé ? Les gens se sont mobilisés parce qu'ils ont eu le sentiment qu'avec ce ticket qui était proposé, la volonté des Sénégalais pouvait être travestie. On pouvait faire une dévolution monarchique du pouvoir ou des choses de ce genre. Les gens se sont révoltés. Moi, je trouve que c'est une bonne nouvelle pour notre démocratie. Ce qui n'est pas bon, ce sont les casses, les actes de violence. Mais, moi, je n'assimile pas le Mouvement du 23 juin à ces casses. C'est tout à fait légal de manifester devant l'Assemblée nationale. Nous mêmes, nous l'avons fait par le passé. J'étais très amusé en regardant les choses se passer le 23 juin, parce qu'en 1994, j'étais le responsable du Comité d'organisation de la Coordination des forces démocratiques qui avait organisé exactement la même manifestation devant l'Assemblée nationale. À l'époque, c'était contre le plan Sakho-Loum. On avait demandé aux députés de rejeter ce plan. Aujourd'hui, je suis dans une autre posture, mais je ne peux qu'être heureux de voir que les citoyens sénégalais, conscients de leur devoir, se mobilisent pour exprimer leur opinion de demander aux députés de rejeter cette proposition de ticket. 

Des voix s'élèvent de plus en plus, même au sein du Pds, pour demander le départ de Karim Wade de l'attelage gouvernemental. Quel commentaire en faites-vous ? 
Pour vous parler franchement, je me demande pourquoi il est encore là ? Pourquoi il est encore dans le gouvernement, dans l'espace public, en train de publier des lettres ouvertes, de polémiquer avec Robert Bourgi ? Honnêtement, ça me dépasse. Peut-être que je ne suis pas assez intelligent. Mais, je trouve que c'est un phénomène tout à fait étrange et irrationnel. Il aurait dû rendre le tablier depuis longtemps pour nous mettre à l'aise. Quand je dis nous, je parle des militants de l'Alternance, nous, qui pensons que, malgré les dérives, les fautes qu'il y a eu, l'Alternance a été une bonne chose, nous, qui voulons pérenniser cette Alternance-là. Je pense qu'il devait penser, depuis longtemps, à nous enlever cette hypothèque-là qui réduit à néant tous les efforts que l'on peut déployer. 

Ne pensez-vous pas qu'avant de partir, le ministre d'État Karim Wade, pour des soucis de transparence, doit faire la lumière sur l'ombre qui plane sur sa gestion, comme le réclament les opposants ? 
Vous savez, nous, notre parti s'est toujours prononcé sur ce genre de questions. À chaque fois qu'il y a eu une annonce de scandale, nous avons demandé une enquête. Nous avons demandé que la lumière soit faite, nous avons demandé que les responsabilités soient situées, que des sanctions soient prises. Quand il y a eu la polémique sur la gestion de l'Anoci, nous avions fait un communiqué pour demander que la lumière soit faite. Notre position, c'est que la lumière soit faite. Puisqu'il s'agit de fonds publics qui sont la propriété de tous les Sénégalais. Et les Sénégalais ont le droit de savoir. 

Le débat sur la recevabilité ou non de la candidature de Me Wade continue de faire rage... 
Il est évident que sur la recevabilité de la candidature du Président Wade, chaque Sénégalais a son opinion et l'a exprimée. Et peut-être finalement, personne ne peut convaincre personne ou imposer son point de vue à un autre. C'est pourquoi en démocratie, il y a des procédures d'arbitrage. Il y a des institutions comme le Conseil constitutionnel qui, quand les gens ne peuvent pas se mettre d'accord, prenne une décision. Je crois que la démocratie, c'est le respect de ces procédures-là. D'ailleurs, le Conseil constitutionnel, ce n'est qu'un premier niveau d'arbitrage. Je trouve qu'on met trop de pression sur le Conseil constitutionnel. Puisqu'après tout, il ne fait que publier une liste de candidatures. Jamais dans l'histoire du Sénégal, le Conseil constitutionnel n'a eu à invalider une candidature. Pourquoi le lui demander aujourd'hui ? Le Conseil constitutionnel ne valide pas, il autorise une liste de candidatures. Maintenant, la véritable validation, c'est dans les urnes. Ce sont les électeurs qui vont valider ou invalider une candidature. Donc, de ce point de vue, il me semble que l'attitude démocratique raisonnable, c'est que les uns et les autres prennent un engagement solennel devant la nation à accepter une décision du Conseil constitutionnel, quelle qu'elle soit, et à accepter le verdict du peuple le 26 février 2012, quel qu'il soit. Je crois que c'est ça la démocratie. Toute attitude contraire ne pourrait qu'être dangereux pour la cohésion de notre société. J'espère que les uns et les autres vont revenir à la raison, et éviter une épreuve de force qui est absolument inutile. Puisque, de toute façon, il y a un arbitre, le peuple sénégalais, un peuple conscient, qui s'exprimera et dont le point de vue s'imposera à tout le monde. 

Le dialogue entre le pouvoir et l'opposition n'est toujours pas relancé, malgré les efforts de certaines franges de la société civile. Que vous inspire un tel état de fait ? 
Je pense que le dialogue politique doit se faire. Il devait se faire bien avant à mon avis. Le dialogue politique, je pense qu'il peut porter sur comment gérer de la façon la plus consensuelle possible toutes les étapes du processus électoral jusqu'au jour des élections. Sur les inscriptions sur les listes électorales, qu'il y ait un dialogue. Que les récriminations soient formulées, que des solutions soient trouvées sur toutes les autres étapes du processus électoral. Je crois qu'il est nécessaire que le processus électoral soit géré avec la participation de tous. Aussi bien les partis politiques, les organisations citoyennes, la société civile. Peut-être qu'il faudrait imaginer une sorte de Comité de pilotage comme dans le passé qui donnerait à tout le monde voix au chapitre. Parce que les élections, c'est l'affaire de tous. Si on engage un dialogue politique sur la recevabilité de la candidature du Président Wade, il y aura une divergence et les conséquences seront négatives pour le pays. Faire un dialogue politique sur un gouvernement d'union nationale, ça n'a pas de sens. Parce que nous sommes à huit mois des élections. Le seul dialogue politique qui vaille à mon sens, c'est celui qui va faire que le processus électoral soit le plus consensuel possible, le plus transparent possible, le plus crédible possible, et celui qui va faire en sorte que le 26 février 2012 le verdict des urnes, quel qu'il soit, puisse être accepté par tous. 

Qu'attendez-vous de l'adresse à la nation de Me Wade prévue le 14 juillet prochain ? 
Honnêtement, je ne sais pas ce qu'il va dire. Mais, j'espère tout simplement que son discours va apaiser la situation, va calmer les esprits. Que ce sera un discours pour convaincre les uns et les autres que le Sénégal est une démocratie solide, et que toutes les opinions, toutes les inquiétudes, toutes les récriminations, peuvent s'exprimer dans le cadre de la démocratie, sans qu'on ait besoin de recourir à la violence. Je pense que, si son discours atteint cet objectif-là, personnellement, je serais satisfait. 

 

Source : Le Populaire

 

Publié dans Et vlan!

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